Bernard Behin

Témoin

Des passages de Juste chrétien

Rencontre inattendue 

À marée montante, si mes souvenirs sont exacts, un soir très clair de novembre, vers 21 heures, je courais presque seul le long de la mer, car il y avait très peu de monde à cette saison. Le temps était très doux et un vent de face caressait mon visage, lorsque j’entendis une voix qui m’appela :

« Bernard, suis-moi. »

J’ai regardé de tous les côtés sans voir personne ; il n’y avait pas âme qui vive à moins de trois cents mètres et pourtant cet appel était aussi clair que si quelqu’un m’avait interpellé à moins d’un mètre. Alors, je n’avais pas compris ce qui se passait. YHWH/Dieu n’était pas dans mes pensées et il m’était impossible d’imaginer un appel venant du ciel. Si j’avais connu le 1er livre de Samuel au chapitre 3, la réponse à mon interrogation aurait été immédiate. C’est quelques années plus tard seulement, lors de ma deuxième rencontre personnelle avec YHWH/Dieu que j’ai reconnu sa voix. À ce jour, je perçois encore cet appel.

 

De passage

Une réunion venait de se terminer au vicariat. Je rentrais chez moi, le soir tombait et il faisait bon marcher quand j’entendis derrière moi des bruits de pneus crissants. Arrivé pratiquement à ma hauteur, le chauffeur tourna à gauche sur deux roues. La fourgonnette se renversa sur sa droite, côté où se situe l’orifice de remplissage du réservoir. Malheureusement, une gerbe d’étincelles, provoquée par le frottement de la tôle contre le sol, mit le feu à l’essence qui s’écoulait. En moins d’une minute, toute la voiture fut la proie des flammes. Impossible d’ouvrir une portière afin de permettre aux jeunes la sortie de cette fournaise. Ils me suppliaient de les sortir de là… Impossible d’ouvrir, je suis resté à leurs côtés le plus longtemps possible ne voulant pas les abandonner à leur triste sort. Mais rapidement, lorsque la voiture s’est totalement embrasée, la chaleur fut d’une telle intensité que par instinct de conservation, je m’en suis écarté de quelques dizaines de mètres.

 

Notre Père des cieux


Le vendredi soir vers 21,00 heures, toutes les activités de la journée étaient terminées. Après m’être lavé et couché, je rêvassais encore en pensant aux riches enseignements reçus. C’était le moment idéal pour établir un premier bilan de la retraite qui touchait déjà à sa fin. Le sommeil s’emparant de moi, je perdis le contrôle de mes pensées et je m’endormais lorsqu’une chaleur foudroyante d’amour enflamma mon esprit et mon corps tout entier. Je ne saurais pas dire pourquoi et comment. La certitude de la Présence de notre Père des cieux s’imposait à mon esprit, sans le voir de mes yeux de chair. J’ai d’abord eu très peur en me demandant si une crise cardiaque n’était pas à l’origine du phénomène, mais petit à petit la peur a laissé place à la tendresse, à l’Amour fou, un Amour qui surpasse tout ce que l’on peut connaître ou imaginer sur le plan humain. L’orgasme le plus fort entre un homme et une femme a peu de saveur par rapport à ce qui m’arrivait. Notre Père des cieux me pardonnait tout mon passé et m’accueillait dans ses bras comme l’enfant prodigue. D’ailleurs, cette parabole (Luc 15, 20) correspond parfaitement à mon expérience. Le temps n’existait plus, chaque seconde avait une épaisseur d’éternité. Lors-que je suis revenu à un état normal, une bonne heure s’était écoulée. Il me semblait que cette rencontre s’était étalée hors du temps. Si vous pouviez ressentir cet Amour du Père pour vous, votre seul désir serait de mourir pour enfin vivre par Lui avec Lui et en Lui. 
 

L'Esprit Saint


Nous étions tous couchés par terre et après un certain laps de temps, tout mon corps s’était mis à trembler avec une certaine violence ; la désagréable impression de décoller du sol agitait mes pensées. Mon ami Roger en était le témoin direct puisque je l’avais bousculé continuellement sans le vouloir. Plus tard, il m’a raconté qu’un Père jésuite dont je ne me rappelle plus le nom avait pris note de cet incident, tant il en avait été abasourdi. Après ce temps de prière, tous les participants s’étaient retrouvés dans une salle pour un enseignement sur l’Esprit saint. Pendant que le prédicateur discourait, je percevais que tout mon corps se refroidissait petit à petit ; mes membres se sclérosaient, me mettant dans l’incapacité de réagir à quoi que ce soit. Impossible de répondre à Roger. J’étais de plus en plus mal, une souffrance indescriptible s’installait en moi, tout mon corps était devenu inerte comme un bloc de glace. Cela m’a semblé durer une éternité. La salle presque vide, je me suis mis à crier comme une femme qui accouche dans des douleurs abominables. J’avais senti sortir quelque chose de moi. Écroulé sur ma chaise dans un état second, incapable de marcher, j’ai été transporté par quelques personnes dans ma chambre pour me reposer. 

 

Jésus Hostie


Le 17 juin, jour de la fête de la Sainte Trinité, dans mon lit, ayant Jésus sous les apparences du pain consacré dans mes mains, j’ai commencé à ressentir une grande peur, j’étais comme écrasé devant la grandeur, la puissance de Dieu ; j’étais en sa présence avec toute ma misère et le poids de mes fautes, mais aussi avec tout mon Amour. Puis Jésus m’a blessé durant quelques minutes d’une flamme ardente, si ardente que toute mon âme et tout mon corps ont été enflammés d’Amour. Cet Amour me plongeait tout entier dans la suavité de l’éternité. Quelques paroles m’ont été dites et gravées par Jésus dans mon esprit et dans mon cœur lors de cette rencontre : « Tu es une petite âme. Tu seras un témoin. Tu auras à souffrir au-delà de tout ce que tu peux imaginer ». À partir de ce jour jusqu’au 16 juillet, fête de Notre-Dame du Mont-Carmel, Jésus Eucharistie m’enflamma presque continuellement corps et âme. 

La Sainte Trinité

Durant cette retraite, la Sainte Trinité s’est révélée à moi dans la chapelle presque chaque jour durant la nuit vers 4 heures du matin, par des visions intellectuelles. À travers chaque texte du Nou-veau et de l’Ancien Testament, notre Seigneur me faisait voir la présence du Père, du Fils et de l’Esprit. Prenons comme exemple le passage de la transfiguration Mt 17,1 à 9 : Comme Pierre, Jacques et Jean, Jésus m’emmène sur la montagne, Jésus est transfiguré devant nous et nous voyons trois personnages. Dieu nous parle toujours à travers des concepts connus : en Moïse, nous reconnaissons le Père, celui qui détient la loi ; en Elie, nous reconnaissons l’Esprit, celui qui est mû par l’Esprit ; Jésus reste Jésus. Une icône typiquement jésuite, avec le Fils au centre ! À Mambré, Abraham (Gn 18) rencontre 3 hommes. Il ne connaît ni Moïse ni Elie et pourtant, il rencontre aussi la Sainte Trinité à travers des personnages familiers. Lorsque Dieu agit ainsi avec nous, c’est qu’il désire sceller une alliance particulière. Dans cet état il y a autant de différence entre ceux qui sont fiancés et ceux qui sont unis par le mariage. Il y a deux natures en un seul esprit et un seul amour.